Théâtre : « Désordres », de Yamina Hadjaoui à la Manufacture des abbesses, à Paris.


La pièce « Désordres » illustre bien son titre. C’est de désordres amoureux dont le spectateur est témoin, entre ce qui se passe, ce qui aurait pu être et les pensées aussi intimes qu’inavouées des membres de ce couple qui va à vau-l’eau*. Les dialogues sont crédibles au point que qui a connu l’épreuve de la séparation y retrouve des attitudes connues. Heureusement, ils sont régulièrement émaillés de répliques qui, par la distance qu’elles révèlent entre les psychologies, deviennent comiques, et ce même si le rythme a parfois des ratées (à la troisième représentation, autrement dit, le temps que cet article soit publié, il aura été resserré).
Du point de vue de la forme, la mise en scène a pris le parti de scènes « cut », un bruitage (dont le sens échappe parfois) assurant la ponctuation entre la fin de la précédente et le début de la suivante. L’ordre des scènes est plus onirique – ce qui met en valeur leur composante méditative – que chronologique. Si parfois le procédé surprend, c’est bien peu dans la mesure où il illustre parfaitement le thème de la pièce. Et si la violence des propos est bien présente, elle ne fait que rendre avec justesse le délitement du couple et l’hermétisme des logiques psychologiques. On est enfin surpris par l’équilibre qu’il y a entre la restitution des psychologies de l’homme et de la femme, la pièce ayant juste pris le parti de décrire un processus.
Pierre FRANÇOIS
« Désordres », de Yamina Hadjaoui. Avec Oriane Blin et Boris Khalvadjian. Mise en scène : Swan Demarsan. Du jeudi au samedi à 21 heures, dimanche à 17 heures jusqu’au 11 octobre à la Manufacture des abbesses, 7, rue Véron, 75018 Paris, tél. 01 42 33 42 03, manufacturedesabbesses.com. Métro Abbesses, Blanche, Pigalle ; bus 67, 54 et 30.

* À vau-l’eau : l’expression existe dès le XIIe siècle. Jusqu’au XVIe siècle, elle garde le sens concret de suivre le fil de l’eau (contrairement à « aller par monts et par vaux » où on grimpe et descend alternativement), dans la vallée. Puis elle prend le sens de partir en déroute et désigne une entreprise qui va à l’échec. S’écrit aussi vau l’eau ou vau-leau.
Sources : https://www.expressio.fr/expressions/aller-a-vau-l-eau, https://www.cnrtl.fr/definition/vau-leau.

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