Théâtre : « Choisis la vie et tu vivras », de Christiane Singer jusqu’au 26 mars au théâtre Essaïon, à Paris.

Spiritualité.
Laurent Brouazin est un homme de passion. Des gens comme cela, il y en a beaucoup, des passionnants comme des emm… Lui fait partie de la première catégorie. C’est parce qu’il éprouvait une tendresse artistique forte envers la Joconde qu’il a monté « Lisa et moi », seul en scène sélectionné pour participer aux Molières. C’est en écoutant la conférence d’une autrice qu’il admire – Christiane Singer – qu’il a compris que c’était ce texte-là qu’il devait offrir au public. Et il le fait très bien alors que le dispositif scénique est des plus spartiates, s’agissant de la fidèle reprise des propos tenus à Montréal en 2004. Chaque mot est pesé. Il sait leur donner corps tant à travers les intonations que la gestuelle, expressives, presque sensuelles. Car c’est une grande douceur qui se dégage de ce texte, un écrit de sagesse, de spiritualité, qui n’a rien à envier aux classiques du genre. Le titre « Choisis la vie » fait écho au chapitre 30, verset 19 du livre du Deutéronome : « J’en prends aujourd’hui à témoin contre vous le ciel et la terre : j’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta postérité ». Et la conférence n’est qu’une longue – et très vivante – méditation sur ce thème, que l’autrice développe dans le sens du « choix entre être un mort-vivant et un vivant jusque dans la mort ». Au passage, elle évoque plusieurs sujets connexes, dont la classique parenté entre une liberté mal comprise et l’asservissement ou le dialogue imaginé par Dostoïevski entre le Christ et le grand inquisiteur. De façon moins classique, mais tout aussi instructive, on rencontre des propos de Hildegarde von Bingen, de Pic de la Mirandole, d’Aline de Souzenel ou tirés du Talmud. On l’aura compris, il ne s’agit pas là du commentaire classique fait par le tenant d’une Église ou d’une autre, mais d’une exploration en toute liberté à laquelle elle convie l’auditeur. C’est de tout cela que Laurent Brouazin se fait le vecteur. Peut-on dire de lui qu’il a repris à son compte la phrase selon laquelle « il faut qu'[elle] croisse et que je diminue ». Ce serait exagéré dans la mesure où Christiane Singer n’a pas besoin qu’on lui permette de croître, mais il y a de cela dans la façon dont il sait s’effacer tout en s’exposant.
Ce spectacle solo, vraie jouissance auditive soutenue par des musiques et des lumières bien choisies, est donc tout autant indiqué pour les personnes en recherche de sens que pour celles qui sont sensibles à la musique des mots et à la gymnastique intellectuelle des vrais chercheurs, ceux qui ne se posent pas de barrière et qui ne sont pas emprisonnés par les préjugés.
Pierre FRANÇOIS
« Choisis la vie et tu vivras », de Christiane Singer. Avec Laurent Brouazin sous les regards extérieurs de Marie Sauvaneix et Pascal Besson. Lumières : Pierre Blostin. Musique : Breda Mayock – New eyes. Samedi et dimanche à 17 h 45 jusqu’au 26 mars au théâtre Essaïon, 6, rue Pierre au lard, 75004 Paris. https://www.essaion-theatre.com/spectacle/926_choisis-la-vie-et-tu-vivras-de-christiane-singer.html. Réservations : 01 42 78 46 42 ou essaionreservations@gmail.com.

Photo : Pierre François.

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