Hors du temps.
« Sauvage » met en scène le rêve d’évasion de tout adolescent. Évasion physique autant que rêvée, d’autant plus que l’action se passe de nuit. Le ton de voix naïf, presque enfantin, participe de cette ambiance. Le récit est descriptif – mais descriptif du désir ou de la réalité, on ne sait – et oral au point qu’il semble spontané. Fantasmagories et divagations enfantines se mélangent avec un contexte d’exploration urbaine. Est-il important de faire le tri ? Aucunement, puisque la poésie du récit nous emporte. Le décor polysémique permet au spectateur de compléter ce qu’il voit selon ses propres imaginations, d’autant plus que la comédienne interprète à elle seule quatre personnages – qu’elle ne perd jamais – des deux sexes. Le travail des lumières guide néanmoins les interprétations à donner à chaque scène. On est hors du temps durant toute la durée du spectacle…
Doit-on être surpris par la qualité de ce spectacle ? Non, si l’on se souvient que c’est la même compagnie qui a commis « La Bête » l’an dernier. Quant à « La Trilogie héroïque », elle a tourné de 2006 à 2015 tandis que « La Trilogie du ring » a pris le relais depuis 2020. La troupe se repose-t-elle sur ses lauriers pour autant ? Non, puisque est déjà en préparation un spectacle – « Les Cosmics », mis au point avec la complicité d’enfants – sur l’univers, qui fera se rejoindre les espaces mentaux, déjà explorés, avec le sidéral. Cinq partenaires scientifiques sont trouvés ainsi que six lieux de résidence d’écriture et autant de préachats. Le pré-teaser est fait (et convaincant). Jusqu’ici, tout va bien. Mais la troupe est située dans la région des Pays de la Loire et l’actualité laisse à penser…
Pierre FRANÇOIS
« Sauvage », thriller éthologique à partir de huit ans, de Karin Serres. Conception et interprétation : Annabelle Sergent. Dramaturgie et collaboration artistique : Christophe Gravouil. Scénographie et lumières : Yohann Olivier. Son : Oolithe. Chorégraphie : Brigitte Livenais. Costumes : Tiphaine Pottier. Construction : Pierre Bouglé. Pupitreuse : Zélie Carasco. Régie son : Jérémie Morizeau. Régie lumières : Julien Jaunet. Du 30 janvier au 1er février au Théâtre Massalia, à Marseille.
Photo : Pierre FRANÇOIS