Théâtre : « Les Hérétiques », de Mariette Navarro au Théâtre de l’Aquarium à la Cartoucherie de Paris.

Chaque chose est un symbole, par Clara.
Dans un avenir proche en France, la religion est partout et cherche à étouffer toutes les libertés.
Les convictions personnelles, lorsqu'elles sont différentes des autres, font peur au point d'être érigées en menace nationale.
Un beau soir, une femme qui doute essaye d'échapper à la dictature imposée par la religion et échoue dans un groupe de femmes marginales. Elles la testent, essayent de cerner ses convictions et motivations. Au début de l'histoire, la femme n'a pas d'idée précise de ce qu'elle espère et désire. Au contact des trois sorcières, au fur et à mesure du dialogue, elle évolue et affirme sa propre voix.
Les sorcières évoquent toutes les dérives faites au nom de la religion. Leurs justes colères et leurs violences sont rendus extrêmes par les souffrances et tortures qu'elles ont endurées, simplement parce qu'elles étaient différentes. Cet esprit revanchard fait hésiter, reculer la dernière. Elle ne veut pas choisir un camp, elle veut juste être libre de croire ce qu'elle veut et d'avoir sa propre expérience de la foi.
Vers le milieu de la pièce, telle une apparition divine, Sainte Blandine propose la voix de la paix et la réconciliation. La sainte a pourtant elle aussi vécu la souffrance et la torture au nom de ses convictions. Cependant, elle est resplendissante de lumière et apaisée.  C'est elle qui apporte de la fraîcheur presque naïve à la pièce.
Pleine d'humour la mise en scène propose un décalage entre le propos assez lourd, presque manichéen, et la forme. Dans un décor qui symbolise l'obscurantisme : une salle de classe à l'abandon, les sorcières rejouent une parodie de procès. Les lumières sont parfaitement maîtrisées ainsi que les effets spéciaux en démonstration du pouvoir limité des sorcières. Il n'y a pas de véritable message, ni thèse ni réponse mais de nombreuses interrogations.
Une belle réussite visuelle rendue admirablement par un décor post-apocalyptique, des costumes néo-gothiques (pour les trois sorcières) et des tours de passe-passe volontairement grotesques qui apportent légèreté, insouciance et humour.
La laïcité est en danger alors qu'elle aurait dû apporter la paix et l'égalité. Chacun devrait être libre de ses convictions sans imposer de jugement. La femme qui doute cherche la lumière et est terrifiée par l'avenir. Elle nous apprend ce qu'est  véritablement l'hérésie : loin d'une philosophie anti-cléricale, il s'agit de trouver sa propre voix, de suivre son chemin, de choisir de manière libre et raisonnée. L'hérésie c'est la liberté tout est respectant le choix  et les différences des autres. Cette pièce est un hymne à la tolérance et la liberté de croire.
Clara
« Les Hérétiques », de Mariette Navarro. Avec Stéphanie Schwartzbrod, Christine Guênon, Yvette Petit, Lymia Vitte, Andréa El Azan. Du mardi au samedi à 20 heures, dimanche à 16 heures au théâtre de L'Aquarium, Cartoucherie, route du champ de manœuvre, 75012 Paris jusqu'au 9 décembre (tél. 01 43 74 99 61, www.theatredelaquaruim.com).
En tournée du 5 au 8 février au Théâtre de Dijon Bourgogne (tél. 03 80 30 12 12), du 26 au 28 février à la Comédie de Béthune (tél. 03 21 63 29 19), le 26 mars au Théâtre Jean Lurcat d'Aubusson (tél. 05 55 83 09 09), le 16 avril à la Ferme de Bel Ebat à Guyancourt (tél. 01 30 48 33 44).

Photo : Pierre Francois.

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