Délicatesse de sentiments.
« Tendresse à quai » est une très belle pièce, jouée avec sensibilité et qui sait surprendre son public. Soient un homme et une femme. Chacun dans son monde. Chacun essayant de deviner celui de l’autre. Tantôt sur le mode du récit et de l’interpellation du spectateur, tantôt sur celui du rôle joué classiquement. Tantôt dans la relation, tantôt dans l’introspection. Tantôt enfin dans l’invention, mais ici pas question de trop en dire.
Dans le rôle muet qui est le sien durant les premières minutes du spectacle, la femme révèle déjà au public une partie de sa psychologie. On perçoit celle de l’homme dès ses premières répliques. Autant dire qu’on croit aux deux personnages dès leur entrée en scène.
Décor et accessoires sont discrètement évoqués, laissant toute la place à une langue soignée. De la même façon, la musique souligne sans emphase inutile le contexte émotionnel. Dans l’attachement dont l’homme fait preuve à l’égard de la femme, on pense d’abord à Ronsard adulant une Cassandre qu’il ne peut plus désirer. Car ces choses sont dites avec un style qui réjouit autant le cœur que l’oreille. La délicatesse avec laquelle les sentiments sont exprimés est réelle et rare. L’humour, car il y en a beaucoup dans ce dialogue intergénérationnel, est fin, spirituel. Jusque dans l’évocation du plaisir intense ressenti par une journaliste connue ou dans une question comme « on ne peut pas mourir tranquille ? ».
Bref, on tient là une pièce qui mérite largement d’être vue.
Pierre FRANÇOIS
« Tendresse à quai », d’Henri Courseaux. Avec Henri Courseaux et Marie Frémont. Mise en scène : Stéphane Cottin. Du mercredi au samedi à 21 heures, dimanche à 14 h 30 jusqu’au 18 novembre au Studio Hébertot, 78 bis, boulevard des Batignolles, 75017 Paris, métro Villiers, Rome, tél. 01 42 93 13 04, www.studiohebertot.com
Photo : Pierre Francois