Théâtre : « François d’Assise », de Joseph Delteil, mis en scène par Adel Hakim, avec Robert Bouvier à la Manufacture des œillets à Ivry-sur-Seine puis en tournée.

Une référence.
« François d’Assise », de Joseph Delteil mis en scène par Adel Hakim et joué par Robert Bouvier est une pièce vue il y a plus de dix ans, alors qu’elle se donnait au  Petit Montparnasse, et elle ne cesse de tourner depuis. C’est le genre de pièce dont on garde un souvenir précis tant elle est juste à la fois du point de vue du texte, de la mise en scène et du jeu.
Elle va revenir du 1er au 12 décembre au Lanterneau, une salle dépendant du Théâtre des Quartiers d’Ivry qu’Adel Hakim a dirigé. A dirigé, car il est mort l’été dernier. S’il était possible de diverger sur les opinions – Adel Hakim n’avait pas l’institution ecclésiale en odeur de sainteté – l’homme faisait partie du club restreint des justes et voir ce spectacle est autant un bénéfice pour soi et notre propre édification qu’un hommage à rendre à l’homme droit qui l’a mise en scène.
« Le cœur voilà l’étalon » dit le texte de Delteil, et c’est à cet étalon-là que Robert Bouvier s’accroche, représentation après représentation. Il relève avec malice qu’un de ses amis journaliste avait l’habitude de faire remarquer que « la langue française précise heureusement par cœur et non par esprit, indiquant par là, combien le sentiment le dispute au cerveau! ». Et c’est bien avec tout son cœur qu’il joue ce personnage si exceptionnel qu’il ne peut se le représenter.
Peu importe, puisqu’en tant que comédien il sait bien que « notre vérité, ce sont les autres qui nous l’accordent, notre vérité, elle restera secrète, tant pis, tant mieux.» (J.-L. Lagarce). Alors qu’importe s’il n’a pas de visage, de modèle à se figurer à partir du moment où il suit la recommandation de l’auteur : que sa seule boussole soit l’innocence, et l’instinct son ange gardien. Ce qu’il fait scrupuleusement.
Le 10 octobre dernier, au théâtre d’Anthéa à Antibes, Robert Bouvier, dans un très beau texte (auquel cet article fait en partie référence) pour la revue poétique « Souffles »*, évoquait l’enciellement de son metteur en scène, victime de la maladie de Charcot. Et le fait qu’avec son régisseur, « nous sommes seuls désormais avec cet héritage si précieux d’une œuvre qu’Adel avait signée et dont il continuait à prendre soin. ». Seulement prendre soin ? Il semble que l’intérêt pour l’œuvre n’était pas que professionnel : « Sur son lit d’hôpital, je lui ai récité le passage du texte où François dit adieu à la vie. Il souriait presqu’avec gourmandise à chaque mot prononcé. ». 
C’est donc avec un immense respect et pour l’œuvre et pour l’auteur et pour son metteur en scène que Robert Bouvier et Bernard, son régisseur, vont continuer à faire tourner cette pièce qui leur a déjà donné tant de souvenirs magnifiques au Théâtre Montparnasse, mais aussi au Collège saint-Maurice (Suisse), à Grabels, dans une salle de gymnastique du Jura, au Théâtre Prospero de Montréal, sur une plage de l’île Maurice, dans la salle mythique de Vidy-Lausanne, dans la chapelle du Théâtre des Halles d’Avignon, lors d’une soirée avec Sœur Emmanuelle, en Guadeloupe, en Ukraine…
Pierre FRANÇOIS
« François d’Assise », de Joseph Delteil. Mis en scène par Adel Hakim. Avec Robert Bouvier. Lundi, mercredi, vendredi à 20 heures, jeudi à 19 heures, samedi à 18 heures, dimanche à 16 heures, relâche le 6 décembre, jusqu’au 12 décembre au Lanterneau, Théâtre des quartiers d’Ivry, Centre dramatique national du Val-de-Marne, Manufacture des œillets, 1, place Pierre Gosnat, 94200 Ivry-sur-Seine, tél. 01 43 90 11 11, métro Mairie d’Ivry, RER C Ivry-sur-Seine, bus 125, 182 et 323.
Puis le 11 janvier au Théâtre Les trois pierrots de Saint-Cloud, les 26 et 27 janvier à l’Atrium de Fort de France, les 2 et 3 février à  La Station Théâtre de Rennes…

* http://www.revuesouffles.fr

Photo : Camille Lamy

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