Théâtre : « Hikikomori le refuge », de Joris Mathieu, en tournée nationale.

Une nouvelle démarche
Théâtre ou jeu vidéo grandeur nature, on se pose la question. Mais, après tout, si cela permet de familiariser un nouveau public avec le monde du mur invisible, pourquoi pas ?
« Hikikomori le refuge », « c'est comme à la télévision » dit un spectateur peu habitué aux salles de théâtre. « Je me sens concerné, ajoute ce père de famille, car le manque de communication que l'on voit sur scène est le reflet de ce qui se passe dans ma famille : chacun est dans son univers électronique et personne ne se confie plus à moi ».
De quoi s'agit-il ? Cette pièce est un mélange de virtualité (qui nous dit que les personnages sont « réels » ?), de mime et de projections vidéo. À chaque spectateur est remis un casque à travers lequel il entend les paroles (et peut-être les pensées) d'un des protagonistes. Il faut choisir en arrivant si on veut entrer dans l'univers de l'enfant qui s'isole dans sa chambre, de sa mère qui dépose des plateaux-repas à sa porte ou du père qui se demande comment le faire sortir de cet enfermement.
Il est clair que si on veut pouvoir comprendre quelque chose à la pièce, mieux vaut y aller à trois, prendre chacun une version différente et se les raconter. Manière de casser les prisons qui nous sont montrées dans la pièce ? On reste dubitatif. En effet, si la forme est parfaitement léchée, on se demande quand même où est l'histoire ? Le paquet est beau, mais vide et c'est aux spectateurs de le remplir après coup. Le jeu est amputé dans la mesure où chaque spectateur n'entend les répliques que de l'un des personnages. Le rythme est plus donné par la musique que par les comédiens. On comprend que la démarche puisse irriter le public habitué aux codes théâtraux classiques. Les autres sont-ils pour autant conquis ? On l'ignore. Car, si c'est « comme à la télé » pourquoi ne pas rester chez soi devant un programme que l'on pourra zapper dès qu'on en aura assez ? Soyons honnêtes : cette pièce est clairement destinée aux générations qui ont adopté le tout électronique. Elle bouscule – pourquoi pas ? – les codes établis, mais on voit mal par quoi elle les remplace si ce n'est pas une forme très soignée. Après tout, si c'est le prix à payer pour que de nouveaux publics entrent dans les théâtres, c'est peut-être une bonne idée…
Pierre FRANÇOIS
« Hikikomori le refuge », de Joris Mathieu. Avec Philippe Chareyron, Vincent Hermano, Marion Talotti. Création Théâtre Nouvelle Génération à Lyon, puis tournée en France : du 19 au 30 janvier au Monfort Théâtre, en partenariat avec le Théâtre de la Ville à Paris, dans le cadre du parcours enfance & jeunesse ; du 03 au 05 février au T.U. de Nantes ; du 11 au 12 février à L’Arc, Scène nationale du Creusot ; du 22 au 26 février au Grand R, scène nationale de La Roche-sur-Yon ; du 02 au 05 mars au Trident, scène nationale de Cherbourg-Octeville ; du 09 au 11 mars à l’Espace Jean Legendre, Théâtre de Compiègne ; du 15 au 17 mars à l’Hexagone, scène nationale Arts Sciences de Meylan ; du 30 mars au 01 avril au Merlan, scène nationale à Marseille ; du 05 au 08 avril à La Comédie de Saint-Etienne, CDN de Saint-Etienne ; du 03 au 04 mai au Théâtre d’Arles ; du 25 au 27 mai 2016 à Bonlieu, scène nationale d’Annecy.
Photo : Nicolas Boudier.

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