Théâtre : « Tant qu’il y aura des coquelicots », de Cliff Paillé à l’Essaïon, à Paris.

Magique !

Il possède un vrai talent de conteur, amplifié par la chaleur de son accent du Sud ! Humour et poésie sont délicatement associés dans le récit qu’il fait de sa vie, sans oublier d’y mettre le zeste de suspens qui rend le spectateur curieux d’entendre la suite. Avec sa complice, qui joue le rôle des deux personnes importantes dans sa vie, sa grand-mère et son institutrice (et qui nous réjouit par son interprétation d’une chanson de Barbara), il nous fait voyager avec poésie au pays des mots. Ce spectacle a valeur d’initiation pour les uns, de révélation pour les autres. En effet, au-delà de la célébration de la beauté de notre langue et de ses auteurs, il montre combien leurs écrits ne sont souvent que le paravent d’émotions que le lecteur doit débusquer derrière une phrase, une expression, une description. Car il y a loin de déchiffrer à lire, comme de passer de l’explicite du récit à l’implicite des mouvements de l’âme. La comparaison qui revient plusieurs fois est celle de la chasse aux œufs de Pâques : il y a ceux que l’on trouve tout de suite car ils sont tombés au beau milieu d’une allée, et il y a ceux qu’il faut trouver au terme d’une recherche plus longue. « Les détails, nous explique-t-il, ce sont les gardiens des émotions ». Avant de conclure, et cela vaut toutes les leçons de philosophie, en citant R. M. Rilke : « Cherche la profondeur des choses, l’ironie n’y descend pas. ». Un grand moment ! Les trois « Petits molières » reçus en 2018 sont bien mérités.

Pierre FRANÇOIS

« Tant qu’il y aura des coquelicots », de Cliff Paillé. Mise en scène : Cliff Paillé. Avec Pauline Phélix, Cliff Paillé. Du jeudi au samedi à 19 h 30 jusqu’au 23 novembre à l’Essaïon, 6, rue Pierre au lard (à l’angle du 24 rue du Renard) 75004 Paris, tél. 01 42 78 46 42, essaionreservations@gmail.com, https://www.essaion-theatre.com/spectacle/849_tant-quil-y-aura-des-coquelicots.html. Photo : ?