Le Poète dramaturge.
On ne dira jamais assez le talent de poète de Claude-Henri Rocquet. Un des plus grands du XXe siècle pour Jean-Luc Jeener. Et on le comprend. Claude-Henri Rocquet, c’était une richesse de vocabulaire exceptionnelle qui lui permettait d’utiliser le mot juste à chaque phrase, des images poétiques aussi sobres que percutantes (il fait par exemple dire à un soldat relatant une bataille « les nôtres avançaient comme un poing dan le feuillage »), un lyrisme et un rythme comme on n’en trouve plus. Certes, lorsqu’il s’agissait de monter ses pièces – c’est d’ailleurs le second tome de son œuvre théâtrale complète qui est paru cet été – les coupes étaient indispensables tant la moindre réplique prend des allures de tirade. Il ne s’en formalisait pas.
Le deuxième tome de son théâtre comprend quatre pièces (en près de trois cents pages) et est centré autour de l’idée du « théâtre du labyrinthe ». Le labyrinthe est le monde de l’homme, l’homme est le Minotaure et il a besoin de saints telle Antigone pour le faire accéder à une vie qui ait du sens.
En effet, pour Claude-Henri Rocquet, il y a deux bibles. La « bible » grecque fait de l’homme le jouet innocent et victime des dieux qui s’amusent de ses déboires. La bible judaïque fait de nous des coupables dont le malheur est justice. L’auteur, dans ces pièces, pose ses personnages comme autant de traits d’union entre ces deux conceptions. Certes, le texte est dense, mais l’enrichissement qu’il procure et sa beauté intrinsèque méritent largement l’effort d’attention qu’il demande.
Pierre FRANÇOIS
« Théâtre complet, tome 2, Théâtre du labyrinthe », par Claude-Henri Rocquet. Éditions éoliennes. ISBN papier : 978-2-37672-008-9 ; ISBN numérique : 978-2-37672-009-6.