Festival off d’Avignon : « Pivot Duras Apostrophe », avec Sylvie Boivin et Claude Gallou au Magasin théâtre.

La réplique.
« Pivot Duras Apostrophe » fait partie de ces pièces qui reproduisent un moment exceptionnel. En l’occurrence, l’émission Apostrophe lors de laquelle Bernard Pivot reçut Marguerite Duras. Le texte est la reproduction intégrale de leur dialogue. La diction de la comédienne est quasiment celle de son modèle et on peut en dire autant des attitudes du comédien. Le souci de vérité est poussé jusqu’à avoir trouvé une table qui ressemble à celle qui était dans le studio. Aussi étonnant que cela puisse paraître, même l’effet hypnotique du petit écran est restitué. D’aucun disent qu’ils n’apprennent rien qu’ils ne sachent déjà sur cette écrivain, d’autres qu’on ne voit pas l’intérêt d’une reproduction aussi fidèle. Mais la question est-elle là ? 
Au-delà de la performance en matière de fidélité à l’événement, il y a aussi toute une ambiance qui est restituée, et de façon plus vivante que devant un écran. La disposition en double frontal accentue cette impression, en utilisant le public d’en face comme si c’était celui du studio d’enregistrement. La mise en scène montre bien le jeu du chat et de la souris qui intervient entre ces deux personnes qui sont en même temps complices de la façon dont elles construisent ensemble l’émission. On sent bien un Pivot qui cherche à orienter le débat autant qu’à mettre à l’aise, allant pour cela jusqu’à dire qu’il n’a rien compris. En face, on voit une femme qui est là sans y être tout à fait, qui ne sort pas vraiment de son univers même si elle s’applique à répondre précisément aux questions posées, où plutôt aux fragments de la question qui l’intéressent. Qui médite sur ce qui lui est demandé, retient sa réponse puis la laisse partir par saccades, comme un ressort qui se déploierait. Pour ceux qui ont fait partie du public dans une émission, l’atmosphère feutrée et contrainte qui y règne est parfaitement restituée. C’est là que la pièce enseigne quelque chose de plus que le texte seul.
Pierre FRANÇOIS
« Pivot Duras Apostrophe », avec Sylvie Boivin, Claude Gallou. Du 6 au 29 juillet à 21 heures (relâche le mardi) au Magasin théâtre, 31, rue des teinturiers, 84000 Avignon, tél. 04 90 86 11 33, 04 90 85 23 23.

Photo : Pierre Francois.

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