Théâtre : « Thérèse l’universelle » à la crypte de N.-D. des champs, à Paris.

« Thérèse l'universelle » est la seconde pièce de Michel Pascal, après « Histoire d'une âme » qui a touché, en français comme en anglais, cent cinquante mille spectateurs de dix-huit pays. On est là dans la catégorie – rare et réjouissante – des pièces spirituelles jouées dans des églises et de qualité professionnelle.

Il faut imaginer le chœur de la crypte de Notre-Dame des champs comme un ensemble sobre de pierre et de bois ciré au mur, vernis au sol, avec pour seul décor une chaise au centre, l'autel étant poussé au fond. Si bien que lorsque la sainte nous explique être en train de nous accueillir au parloir pour y raconter sa vie une heure durant, la cohérence entre le propos et le décor naturel du lieu est totale.

La comédienne travaille dès le départ le côté simple du personnage et espiègle de son regard de sorte qu'on y croit immédiatement. Son ton de voix joue à la fois – et avec succès – l'émerveillement, le naturel et le calme.

Le péril est paradoxalement dans le texte : nous savons tous combien notre esprit s'évade facilement d'un propos méditatif, que ce soit à l'écoute ou en lecture (sauf évidemment pour les apophtegmes des Pères du désert du fait de l'inattendu de leur sage saveur). Cette biographie spirituelle n'échappe pas à la règle et l'esprit du spectateur se distrait de temps en temps (infiniment plus rarement que lors d'un sermon ou d'une retraite cependant).

Le texte est émaillé de sentences qui font mouche : « la méditation, c'est rentre dans ta chambre ; le christianisme, c'est ouvre ta fenêtre », « sans paix, il n'y a pas de vie », « j'ai toujours dit non au non, car le oui est un oui à la vie », ou encore « nous partons en pèlerinage pour revenir à nos rêves, au-delà de nous-mêmes, à Dieu »…

Heureusement, la mise en scène prévoit quelques surprises qui, tout en relançant le rythme restent dans le ton de l'ensemble. Les deux dialogues avec sœur saint Pierre sont par exemple l'occasion d'enseignements humoristiques sur l'humilité et la grâce. Et on assiste à un moment de vivacité lorsqu'il est question de sa prière pour le condamné à mort Pranzini. Il est vrai qu'on aurait apprécié que la période de ces relances soit plus fréquente, mais le jeu de la comédienne supplée presque entièrement à ce manque.

Le seul vrai défaut de la pièce est bien ailleurs que dans la mise en scène ou le jeu : ce sont les craquements des chaises dévolues aux spectateurs ! Dommage pour une pièce qui arrive à Paris après avoir connu le succès à Montréal, Kuala-Lumpur, Albi, Vienne, New-York, Singapour ou Dubaï.

À l'issue de l'avant-première qui a été donnée le 4 novembre avait lieu une table ronde réunissant une religieuse ayant accompagné les reliques de sainte Thérèse en Russie, un bouddhiste, un poète musulman et un rabbin. On n'a pu qu'admirer l'humour délicat avec lequel ce dernier a déposé une pierre dans le jardin de ses amis catholiques, s'étonnant de ce que ceux-ci s'étonnent du succès remporté par la sainte auprès des personnes de tous horizons alors que les mystiques sont par essence des modèles pour tous, quelle que soit leur tradition religieuse…

Pierre FRANÇOIS

« Thérèse l'universelle », de et mis en scène par Michel Pascal. Avec, en alternance : Justine Thibaudat, Marie Lussignol. Jusqu'au 31 décembre à la crypte de Notre-Dame-des-champs, 27, rue du Montparnasse, Paris 6e, tél : 07 82 92 18 82, www.thereseluniverselle.net. Horaires : lundi et mardi à 17 heures et 20 h 30, mercredi à 20 h 30, jeudi et vendredi à 14 h 30 et 20 h 30, samedi à 20 h 30, dimanche à 16 h 30.

Photo : Annabel du Plessix.

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