Bon sens.
« C’est comme si on avait appuyé au bon moment sur le bon bouton » confesse Delphine Lalizout, de la Compagnie demain on déménage. « Le projet s’est monté très vite, il date d’il y a moins d’un an et on en est à la réalisation » confirme Emmanuel Landier, de la Compagnie décalages présents. « Par moments, cela allait trop vite » ajoute Jean Quercy, de la Compagnie théâtre averse. Quant à Nadia Rémita, de la Compagnie nutritive, elle se réserve pour les explications techniques.
Mais qu’ont donc inventé ces troupes – et seize autre autour du Synavi – qui soit si novateur et arrivant à point ? Elles sont parti d’un triple constat.
Les compagnies théâtrales doivent payer pour travailler, ce n’est pas parce qu’une pièce est programmée trois semaines qu’elle est achetée pour autant de temps. Le nombre moyen de fois où un spectacle est acheté en Île de France est de… deux ! Le reste du temps, c’est la compagnie qui loue la salle ou paye un « minimum garanti » au théâtre, de sorte que si les spectateurs payants ne sont pas assez nombreux, c’est la troupe qui au mieux règle la note, au pire tombe en faillite.
Celles qui bénéficient de subventions, de plus en plus rares, les reversent en grande partie à des entreprises privées pour payer des lieux, assurer la communication, se loger… le cas le plus patent étant celui du festival d’Avignon.
Et les subventions sont appelées à diminuer encore alors que les troupes rencontrent plus de programmateurs à ce festival une fois par an que durant toute l’année dans leur région d’implantation.
L’idée est donc de se regrouper pour passer à un système de circuit court. Il s’agit de réunir en un même lieu, proche de tous, les partenaires qui font qu’un spectacle vit. Des troupes professionnelles respectueuses de la législation qui se réunissent autour du Synavi pour montrer leur travail en toute liberté et qui acceptent d’œuvrer collectivement (les unes faisant la billetterie des autres par exemple). Des théâtres qui mettent à disposition leurs salles durant toute une journée pour que plusieurs pièces puissent y être jouées à la suite. Des programmateurs qui s’engagent à venir pendant une journée (sans cependant s’engager à prendre un spectacle) et à débattre ensuite avec les compagnies. Et, bien sûr, du « vrai » public.
Et ils y sont arrivés !
Les lieux ont été trouvés. Les troupes franciliennes qui ont accepté de jouer le jeu de s’entraider sont une vingtaine. Et il y a autant de programmateurs de la région à s’être engagés à venir une journée entière et à débattre des travaux avec les artistes de façon désintéressée, qu’ils achètent ou non un spectacle. Enfin, le festival ne vise pas que les professionnels, il est ouvert au public habituel des salles, qui sera cette année majoritairement scolaire ou retraité dans la mesure où les pièces se donnent durant toute la journée. La Spedidam, l’Arcadi et l’Adami ont largement soutenu l’organisation de ce nouveau festival. Le point le plus important, pour ces quatre compères, est celui de la dimension humaine qu’ils veulent mettre au centre de la manifestation. Ils ne lâcheront pas sur ce point. Heureusement pour tout le monde.
Pierre FRANÇOIS
La programmation de Scènes sur Seine
La vingtaine de travaux présentés et très éclectique. On note la présence de huit spectacles pour le jeune public (« Obscurité lumière », « L’Ogrelet », « La Baraque foraine et son journal illustré », « Soleil nomade », « Perle de lune », « Le Chemin des mots magiques », « Capitaine Vendetto », « Courage »), trois maquettes (« Fasse le ciel que nous devenions des enfants », « Ligne de fuite », « Le Départ »), autant de lectures (dont « Certaines n’avaient jamais vu la mer » et « Insomnie », cette dernière dans le noir), trois spectacles de danse, un « clownesque et féministe » (« L’Ôtre belle »), un de théâtre de narration (« Déméter »), un mêlant théâtre et musique (« Nola radio »), la moitié des pièces étant destinées à tout public ou aux adultes (dont « L’Amant » et « Ashes to ashes », « L’Affamée » et « L’autre fille »). Les représentations auront lieu les 12 et 13 octobre au Théâtre Paul Éluard de Bezons (95), le 15 octobre au Théâtre de l’usine d’Éragny-sur-Oise (95), les 26 et 27 octobre au Vent se lève à Paris et du 31 octobre au 3 novembre à Gare au théâtre à Vitry-sur-Seine (94).
Tél. 01 34 10 20 20 (Bezons), 06 72 40 76 66 (Éragny-sur-Oise), 01 55 53 22 26 (Vitry-sur-Seine). Le tarif est au maximum de 15 € pour la journée (le nombre de spectacle varie selon la configuration des lieux, de 13 à Bezons à quatre au Vent se lève).
Photo : Pierre François. Légende : des membres du comité de pilotage en réunion.