Théâtre : Festival À vif, jusqu’au 28 mai, une initiative du CDN Le Préau, à Vire.

Jeunesse et théâtre.
Le festival À vif, sur le thème des « chants de batailles » et organisé par Le Préau jusqu’au 28 mai, anime la ville de Vire en confiant une part de sa programmation en direction de et avec des adolescents. Qu’il s’agisse de déambulation dans les rues ou des spectacles, ils sont là.
Car le festival a commencé par un défilé à la couleur du code vestimentaire de l’année – bleu pailleté – avec des ballons autour d’un dragon. Les jeunes étaient aussi bien dans le cortège que dans le public et sur la scène musicale installée devant le théâtre, lieu d’arrivée de la manifestation.
En ce qui concerne les spectacles, l’un avait lieu dans la salle du théâtre et l’autre dans un lycée professionnel. Dans les deux cas, on jouait à guichet fermé.
« Le Cœur de la terre » est une création écrite et mise en scène par Simon Falguières avec la complicité artistique de Louis de Villers et, sur le plateau, Sonia Bony et Lola Roy. Pour les artistes professionnels. Car il faut leur ajouter treize adolescents de Vire et des alentours, ainsi que vingt-quatre élèves de terminale au lycée professionnel La Tournelle, dans les Hauts-de-Seine.
Cela donne un spectacle poétique et vivant dans lequel chacun tient bien son rôle à sa juste place. Les interrogations sur la vie s’y entrechoquent dans un contexte fantasmagorique, et c’est là la force de ce spectacle : on est à la fois en plein imaginaire et dans une réalité concrète, les deux se nourrissant réciproquement. Le langage est oral, spontané, ponctué d’effets comiques, le plus souvent dus à un pas de côté par rapport au contexte. Les lumières, sobres, sont justes.
La seconde partie se présente comme une possibilité de réponse aux doutes : il faut creuser, explorer ce qu’il y a au fond de notre cœur pour que chacun puisse y trouver sa réponse, en toute liberté. Même si c’est difficile : « Je vais aimer, beaucoup. Je vais être heureuse, beaucoup. Je vais être malheureuse, beaucoup. Mais je ne m’arrêterai jamais. »
Le contraste est marquant avec « Fille de », un seul en scène qui se donnait dans la – en comparaison – petite salle de spectacle du lycée professionnel Jean Mermoz. La comédienne, qui raconte son histoire d’exil forcé, n’est pas seule pour autant : elle a pris le parti du théâtre d’objet et peut ainsi présenter au public sa mère, son frère et elle-même sous une forme qui évoque les têtes réduites des Jivaros. Des inscriptions indiquent l’existence de « L’autre mère » et du « Père » ainsi que la reprise des répliques fortes du spectacle. Elle parvient à transmettre les émotions qui furent les siennes à l’âge de quinze ans, lorsqu’elle réalisa que le voyage en France n’était pas de vacances, comme cela avait déjà été le cas, mais sans retour. Il n’y a là nul jugement, mais un témoignage qui donne à réfléchir, tant du fait des réflexions que son physique de franco-djiboutienne appelait que de la façon dont son frère réagit à ce déracinement ou de l’analyse de ce qu’aurait été son avenir si elle était restée. On est là en pleine humanité, là où rien n’est univoque ni définitif. Du fait de la petite forme du spectacle, tout repose sur le jeu de la comédienne, et il est d’une justesse confondante.
Le festival comporte encore d’autres spectacles, que l’on ne peut qu’évoquer, ne les ayant pas vus : « Merci de votre compréhension », par Elsa Grzeszczak et Elsa Delmas ; « La Mémoire bafouée », par Violeta Gal Rodriguez ; « Lopakhine danse à Vire », conçu et mis en scène par Liza Machover.
Pierre FRANÇOIS
Festival À vif, jusqu’au 28 mai, une initiative du CDN Le Préau, à Vire. Tarif unique : 5 €. Renseignements et réservations : 02 31 66 66 26, billetterie@lepreaucdn.fr, www.lepreaucdn.fr.
« Le Cœur de la terre », création 2024. Texte et mise en scène : Simon Falguières. Création participative avec des jeunes de Vire et de Nanterre. Lumières : Léandre Gans. Son : Hippolyte Leblanc. Costumes : Lucile Charvet et Lola Guillain. Accessoires : Alice Delarue. Tournée : jusqu’au 28 mai à Vire, le 25 mai à 16 heures au Moulin de l’hydre à Saint-Pierre-d’Entremont, le 8 juin à 18 heures au CDN Nanterre-Amandiers.
« Fille de », de et par Leila Anis. Mise en scène et scénographie : Justine Bachelet. Conception personnages miniature : Cécile Paysant et Justine Bachelet. Décor : Morven Bouget et Justine Bachelet. www.compagnielabase.com.

Photo : Pierre FRANÇOIS

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