On s’interroge cependant quant aux clefs de lectures permettant d’appréhender ce récit sans début ni fin – « On peut ouvrir mon livre à n’importe quelle page. », dit-il – et qui se situe dans un réel au-delà de la réalité connue. Pourquoi enfin son texte est-il si marqué par le sexe et la drogue – « Alice, opiomane et tétraplégique, se fait faire des tournantes dans les geôles du palais par les soldats de carte de la Reine. », « Dans un hôtel de Montmartre, l’obèse Calliope, torchée à la B and B, ne peut ni éteindre ni retirer son godemiché électrique. », « À cause d’une querelle amoureuse entre gouines bourrées, nues sur un grand lit à baldaquin, avec des tessons de bouteille de Rock and Rye, Érato coupe la langue de Terpsichore qui lui crève les yeux. »… – alors que quand on lui tend une feuille comportant ses passages les plus marquants, il n’en indique aucun de cette espèce-là comme important ?
C’est sans doute la réponse à cette dernière question qui est la plus simple. « Je subis le nihilisme, mais n’y adhère pas », explique-t-il (et on note ici son changement d’attitude par rapport aux convictions qu’il affichait au tournant du siècle), « et je dois en passer par là à cause du modernisme, pour planter la croix de mes propres souffrances dans une église ». C’est là sa façon de désacraliser le nihilisme.
Pierre FRANÇOIS
« Le Chant de la merveille du monde », de Christian Ganachaud, aux éditions Pierre Guillaume de Roux, ISBN 978-2-36371-167-0, 250 pages, 20 €.
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Photo : Pierre François.