Théâtre : « Marco Polo et l’hirondelle du Khan », d’Éric Bouvron au théâtre La Bruyère, à Paris.

Politique amoureuse.
« Marco Polo et l'hirondelle du Khan » vient après le succès des « Cavaliers », adaptés de Joseph Kessel. On s'attend donc à un spectacle équilibré et fin. Que nenni ! Il s'agit de la rencontre imaginée entre Marco Polo, Kublai Khan (petit fils de Ghengis Khan) et la femme, jusque là fidèle, de ce dernier. L'auteur a écrit ce texte parce qu'il avait le sentiment de ne pas avoir assez exploré les mystères des steppes, après s'être documenté sur les deux personnages masculins (mais aucun récit ne relate leurs relations alors que Marco Polo a vécu seize ans à sa cour) et sous l'inspiration d'« une force chamanique des steppes ».
Le résultat est – les micros étant paraît-il correctement réglés – une musique envahissante qui, si elle n'empêche pas de saisir le sens des dialogues qui l'interrompent, ne permet pas de croire aux personnages. Si les airs joués sur scène sont cohérents avec le contexte, on se demande encore quel sens donner à ceux de hang qui n'exploitent que le trentième des possibilités de l'instrument et qui sont eux-mêmes dissous derrière une musique électronique douteuse.
Du coup, on en reste au récit, faute de pouvoir entrer en empathie avec ces trois figures d'exception. Et il ne s'agit plus que d'une histoire finalement banale. Telle Cléopâtre se détournant d'un César vieillissant et dont la santé chancelait, l'épouse préférée du Khan va répondre à la question du jeune éphèbe « mais l'aimes-tu ? » par le don muet de sa personne. Le mari va évidemment s'en apercevoir et, en fin politicien, se venger de façon raffinée en même temps qu'il utilisera cet épisode pour inculquer quelques leçons de politique à son rival et apprenti.
Si on avait pu croire à la situation et aux personnages, le spectacle aurait certes acquis une dimension bien supérieure. Mais peut-être ne s'agissait-il que d'un problème de rodage ?
Pierre FRANÇOIS
« Marco Polo et l'hirondelle du Khan », de et mis en scène par Éric Bouvron. Avec Jade Phan-Gia, Kamel Isker ou Eliott Lerner, Laurent Maurel. Aux instruments et au chant : Ganchimeg Sandag, Bouzhigmaa Santaro, Cécilia Meltzer, Didier Simione. Du mardi au samedi à 21 heures, matinée samedi à 15 h 30 au Théâtre La Bruyère, 5, rue La Bruyère, 75009 Paris, tél. 01 48 74 76 99, métro Saint Georges, www.theatrelabruyere.com

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *