Francophonie : le français de Nouvelle -France

Québécismes, par Pierre de Saint-Genest.
Les Québécois vivent loin de la France. Il est peu surprenant que la langue ait évolué différemment sur tel ou tel point, sans compter le fait que, afin de ne pas perdre leur caractère francophone, les mots anglais ont systématiquement une traduction.

Voici quelques exemples de mots et expressions que l’on peut rencontrer au Québec. 
-On ne dit pas un « spoiler » mais un « divulgâcheur » (lorsque l’on donne des éléments importants sur un livre, un film ou une série, éléments susceptibles de diminuer l’intérêt de lire le livre ou voir la série).
-On ne parle pas de « Home cinema », on dit un « cinéma maison ».
-On ne regarde pas un film : on « écoute un film » (de même que dans « Cyrano de Bergerac », pourtant écrit au XIXe siècle, on va « ouïr la messe à Saint-Roch » ; en matière de théâtre ce n’est que vers 1630 qu’en France l’« auditeur » devient peu à peu « spectateur », avec l’avènement de la salle à l’italienne).
-Le « pot » (prononcer « pote ») désigne le cannabis. 
-Lorsque quelque chose est ennuyeux, sans intérêt, on dit que c’est « plat » (prononcer « plate »).
-Il n’est pas rare d’entendre des doubles négations qui feraient hurler d’horreur les puristes : « je n’ai pas vu personne », « je n’ai pas rien fait », par exemple.
-De quelque chose qui est fait en dépit du bon sens, n’a pas de sens, on dit que « ça n’a pas d’allure ».
-Il est courant de dire : « ce n’est pas si pire », « c’est moins pire », « c’est pas pire ». Le mot pire est ici plus ou moins synonyme de grave.
-Un « dépanneur » est une épicerie de quartier.
 -« J’ai pris mes pattes » : j’y suis allé à pied.
-Il y a ici un verbe inconnu en France : « pogner ». Il a plusieurs sens, un peu comme le verbe « to get » en anglais. Par exemple, un automobiliste qui pratique le covoiturage et n’aura pas trouvé de passagers pour un trajet dira : « j’ai pas pogné personne ».
-Un autre verbe surprend les nouveaux venus : « garocher, se garocher ». Il signifie principalement jeter, se jeter ou  se placer à un autre endroit après un déplacement. 
-« Être en maudit » : être énervé, bouillir intérieurement.
-Une « can » (à prononcer « cane ») : une boite de conserve.
-Des « guenilles » : des torchons.
-« Pantoute » : pas du tout.
-Un « ivressomètre » : l’appareil qui mesure le taux d’alcoolémie.
-« Se tasser » : se pousser pour faire de la place à quelqu’un d’autre.

Il existe enfin un supplément dans les phrases interrogatives : le « tu ». Il s’agit manifestement d’un mot qui vient confirmer le caractère interrogatif de la phrase et remplace plusieurs mots.
Par exemple au lieu de dire : « Est-ce que l’on parle de la même chose ? », on entendra « On parle tu de la même chose ? ».
Autres exemples :  
Est-ce que tu veux [faire ceci] ? = « Tu veux tu [faire ceci] ? »,
Est-ce possible ? = « Ça se peux tu ? »,
Est-ce que cela vous dérange que je fasse un appel = « ça vous dérange tu que je fasse un appel ? »,
Est-ce que ce spectacle était bon ? = « C’était tu bon ? »,
Est-ce qu’il fait chaud dehors ? = « Il fait tu chaud dehors ? ».

Enfin, les jurons n’ont rien à voir avec ceux que l’on rencontre en France. Au Québec, on n’utilise d’ailleurs pas les mots jurons et jurer mais « sacres » et « sacrer ».
Ces sacres sont, comme leur nom le laisse supposer, issus du vocabulaire religieux. Voici les principaux, avec leur prononciation entre parenthèses (lorsqu’elle est différente de celle que l’on connaît) :
– Christ (criss),
– Hostie (osti ou asti selon les cas),
– Tabernacle (tabernac),
– Calice (Côliss),
– Calvaire.
Ces sacres peuvent être associés entre eux ou à d’autres mots.
Par exemple : Christ d’hostie de tabernacle, une christ de folle (espèce de folle), un hostie de niaiseux (niaiseux = stupide, idiot).
Il existe une version atténuée de certains de ces sacres :
Venant de tabernacle : tabernouche, taberouette, 
Venant de calice : corline.

Pierre de Saint-Genest

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