Feuilleton : « Chaînon manquant », par LTL : épisode 8.

Jean allait donner un cours d’actualité politique. Toute la nuit, il l’avait préparé avec les informations données par Paul. Pendant le cours, il demanda à ses élèves :
« Mesdemoiselles, Messieurs, est-ce que certains parmi vous ont entendu parler des sumériens ?
La salle resta silencieuse. Pourtant, une petite main se leva. Il s’agissait d’une petite brune aux cheveux courts. Elle dit :
— J’en ai entendu parler. Il s’agit d’une civilisation installée au Moyen-Orient, il y a plusieurs milliers d’années. Il est intéressant de noter cet emplacement géographique, car c’est un lieu très convoité. Je veux dire… le pétrole… tout ça….
— Quel rapport ? fit le professeur.
— C’est étrange car c’est au Moyen-Orient qu’a lieu le plus grand nombre de conflits. Il est vrai que les grandes puissances recherchent le pétrole, mais, et s’il n’y avait pas que cela ?
— Précisez votre pensée.
— Nous le savons tous, les trois religions monothéistes, les trois religions évoquant un dieu unique, ont toutes leur berceau dans cette région.  Il y a un acharnement des pays riches à contrôler ce lieu. Et la guerre en Irak, j’y viens, a permis de mettre la main sur des sites archéologiques qui, s’ils étaient publics, nous fourniraient des réponses sur les débuts de notre histoire… 
— Et Sumer ?
— Les sumériens étaient installés au Moyen Orient, proches de l’Irak, proches de la Palestine… Je ne sais pas où exactement. Mais ce qui est sûr c’est que les sumériens en savaient plus que nous en astronomie. Ils ne voyaient pas le monde tel que nous le voyons. Et si un jour nous parvenons à leur niveau de connaissance, ce sera comme une « deuxième découverte de l’Amérique ».
Une sonnerie retentit, interrompant le cours. La jeune fille rassembla en vitesse ses affaires et partit. C’était la deuxième fois qu’une de ses étudiantes l’interpelle de la sorte et se sauve. Avant qu’il ne soit trop tard, Jean ne voulut pas prendre le risque de perdre de vue encore une fois un tel interlocuteur. Il se précipita dans les couloirs et rattrapa la jeune fille. Surprise elle lui demanda :
« Qu’y a-t-il ? Aurais-je oublié quelque chose ?
— Vous n’avez oublié aucun objet. Mais vous avez oublié de m’expliquer ce que vous voulez dire par rapport à cette histoire de « deuxième découverte de l’Amérique » !
— Trois fois rien… Je pense juste que dans notre société, les gens ont tout vu tout entendu. Ils le croient. Mais ce n’est pas le cas. On ignore beaucoup de choses. Et si nous en savions plus sur les sumériens nous aurions peut-être des réponses… Mais ces connaissances restent précieusement gardées. Oui… si la population savait, si la population était « consciente », plus rien ne serait sous contrôle. 
— Si la population savait quoi ?
— Si elle savait ce qui réellement dirige le monde. Maintenant excusez-moi, j’ai un cours, je dois y aller.
— Et qui dirige le monde ?
— Informez-vous ! Lisez ! Au revoir professeur. »
Elle le quitta sans un dernier regard. Une fois rentré chez lui, il reprit la lecture du livre « témoignage », trouvé quelques temps plus tôt dans une bibliothèque. Il ouvrit un nouveau chapitre qui s’intitulait « nos origines ».
« Mon âme a quitté mon corps et s’est retrouvée sur une autre planète. Et les êtres qui s’y trouvaient, et à qui nous ressemblons, en quelque sorte, m’ont expliqué certaines choses au sujet de la Terre. Le plus illustre de ces êtres, un dénommé Ka, m’a confié que la Terre souffrait. À cause de la pollution, à cause du gaspillage, de l’égoïsme des gens.  Comme si les gens avaient perdu toute foi en l’avenir, tout respect pour leurs enfants. Je posais alors la question : « Mais, comment cela se fait-il ? Cela a-t-il toujours été comme cela ? » On me répondit que non. Que c’était une question de cycle et que les humains de la Terre étaient des êtres beaucoup plus évolués qu’eux-mêmes ne l’imaginaient.  « En réalité, vous avez tout pour réussir. Il manque juste un déclic. Votre civilisation a fait un immense pas en avant en réduisant les guerres. Maintenant, c’est en vous que ça se joue ! Vous vivrez un âge d’or. C’est sûr. D’autres civilisations avant vous ont expérimenté ce moment. Certaines ont échoué, certaines autres l’ont dépassé et ont expérimenté encore davantage. Le tout est de vous rappeler ce qui est important pour vous. Vous êtes libres. Et votre planète est en voie de guérison. Les humains de la Terre nous font de la peine parfois, en ne regardant pas suffisamment autour d’eux. En refusant de sortir de schémas douloureux. Mais c’est votre libre arbitre et vous avez toute la capacité de résoudre ce que vous avez à résoudre. ».
Anne poursuivit son récit :
« Malgré les encouragements de cet être je ressentais une grande impuissance. Je connaissais la Terre. Depuis très très longtemps. Mais j’avais la sensation de tourner en rond. Ka m’avait parlé de cycle. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Je me demandais les liens entre les êtres comme Ka et « l’Humanité de la Terre », comme il l’appelait. Je lui dis :
— Ka… qui êtes-vous… Où suis-je ?
Il me sourit et répondit :
— Tu es dans un monde voisin de la Terre. Un monde de beauté et de lumière, qu’on appelle communément « Vénus ». » »
Quelqu’un frappa à la porte. Jean interrompit sa lecture. Il ouvrit. C’était encore Adèle. Elle lui demanda :
« Jean, j’ai besoin de tes conseils. Comme professeur, tu connais beaucoup de choses, tu pourrais me conseiller sur un livre à lire ? Qu’est-ce que tu lis en ce moment ? Oh, je vois ! Qu’est-ce que c’est ?
Elle posa le regard sur le livre que Jean était en train de lire, posé sur le canapé. 
— Écoute, Adèle, je suis occupé, là ! fit Jean. Je n’ai pas te temps d’en parler. Je t’enverrai un mail avec une liste de bouquins si tu veux, mais là j’ai besoin d’être tranquille ! »
Il entraîna la jeune femme vers la sortie.
Paul conduisait un avion traversant l’océan Atlantique. Attentif mais aussi quelque peu perdu dans ses pensées, il se remémora alors les paroles du magicien :
« Vous n’êtes pas uniquement votre tête ! »
Dans son métier, la tête était très importante. Un instinct de survie. Mais il y avait un moment où il fallait vivre, et non plus survivre. Et les expériences les plus heureuses de sa vie étaient passées par son corps et son cœur. 
Il avait toujours aimé l’avion. Sans aucune raison. Il se dit tout d’un coup intérieurement :
« Le sang bleu… le sang du ciel ? Moi, le ciel, je le touche tous les jours ! Qu’est-ce que cela veut dire, à la fin ! À défaut d’être un aristo, je suis un pilote d’avion ? Pourquoi les membres de monarchies auraient le sang bleu, le sang qui vient du ciel ? » Soudain, il aperçut un objet fonçant droit devant l’avion. Il l’évita de justesse.
« Qu’est-ce que c’était ? demanda une hôtesse à côté de lui.
Le copilote de Paul répondit :
— Objet Volant Non Identifié. »
Ils furent silencieux, ne sachant pas comment identifier cet objet. Ce n’était pas un avion. C’était petit, arrondi et très rapide.  Aucun passager n’y avait prêté attention et, pour gérer la situation, Paul dit à son équipe d’hôtesses de l’air et de stewards de ne pas prêter attention à ce qu’ils venaient de voir.
« On ne sait pas ce que c’est. C’est peut-être un appareil de l’armée. Restons sur nos gardes, ne laissons pas notre imagination nous inventer des sornettes ! »
Mais cet objet, comme certains de ses collègues, il l’avait vu. Et il trouvait lui-même son interprétation peu convaincante. Ils survolèrent l’Atlantique sans autre incident. 

 

Photo : LTL

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *