Théâtre : « Pierre et Mohamed » à la Crypte saint-Sulpice et en tournée

Un miracle est-il spectaculaire ? Dans l’évangile de Jean, le mot grec traduit par « miracle » est celui de « signe », et on parle du « signe » que fit Jésus à Cana. Cette notion explique que chacun puisse rester libre face à ce qui ne contraint jamais la liberté des conviction (le maître de maison ne comprend pas ce qui s’est passé à la différence des serviteurs). Rappelons qu’en d’autres circonstances d’aucun crurent – et certainement de bonne foi – qu’il guérissait par le pouvoir du démon. Et qu’aujourd’hui d’autres encore croient – et cela n’enlève rien à leurs mérites – que les évangiles ne sont que fables.
Quel rapport avec un spectacle ?
Quand une pièce tient l’affiche plus d’un an dans un théâtre ayant pignon sur rue, on parle déjà d’exploit. Qui peut être dû à la qualité artistique du jeu (par exemple « Le Porteur d’histoires ») ou à la convergence entre le propos et des instincts bien ancrés dans notre nature (par exemple « J’aime beaucoup ce que vous faites »).
Que dire quand un spectacle marche durant des années alors qu’il se joue à une heure impossible dans un lieu inconnu et dans un style qui, s’il est apprécié des grands (Francesco Agnello, prix de la Villa Médicis en 1996, travaille avec Eugenio Barba, Pippo Delbono et Peter Brook), laisse parfois le public – celui qui aime entendre ce qu’il a déjà entendu – d’autant plus perplexe que l’instrument utilisé – le hang – est à la fois rare et récent ?
Que, peut-être, ce spectacle rejoint le public dans une de ses aspirations les plus profondes – le désir de paix et de tolérance – et lui montre que rien de ce qui est positif n’est impossible. Alors chrétiens (le quartier de saint-Sulpice, où la pièce est jouée quand elle est à Paris, n’est pas celui de la Goutte d’or) et musulmans (la pièce a été jouée dans un des deux lycées français de cette confession) cessent de se regarder avec défiance et peur. Et un constat s’impose : les noms de Pierre (Claverie, évêque d’Oran) et Mohamed Bouchikhi (son chauffeur) restent dans les mémoires tandis que ceux de leurs assassins ne sont pas près d’y entrer.
Et qu’effectivement, c’est un « signe » que ce spectacle tienne l’affiche, et en tournée et à Paris, depuis trois ans déjà !
Dans un genre très différent, il rejoint la veine cultivée par « Couscous aux lardons »…

Pierre FRANÇOIS

« Pierre et Mohamed », d’Adrien Candiard. Avec Francesco Agnello et Jean-Baptiste Germain. Le 30 janvier à Brest, 5 février au Vésinet, 6 à Vincennes, 7 à Marseille, du 9 au 12 à Bruxelles, le 15 à Sainte-Geneviève-des-bois, du 3 au 7 mars à Athis-Mons, le 8 à Trappes, le 16 à Valence, le 19 à Clermont-Ferrand, les 25 et 26 à Margency, lez 29 à Villeneuve-saint-Georges, le 30 à Épinal, le 6 avril à Mulhouse, le 13 à Metz, du 14 au 20 en Algérie, le 12 mai à Marseille et du 13 février au 28 juin à Paris, crypte saint-Sulpice.

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