Théâtre : « D’autres vies que la mienne », Emmanuel Carrère, au Théâtre de la reine blanche, à Paris

« D'autres vies que la mienne », par David Westphal.

2004. Emmanuel Carrère est témoin du tsunami qui ravage les côtes de l'Asie du sud-est. Catastrophe naturelle, scènes surréalistes, tragédies humaines. Quelques mois plus tard, en France, il est de nouveau confronté à la mort, par le décès d'une jeune mère atteinte d'un cancer. De ces événements sans liens apparents il tire un texte pudique et fort.

« D'autres vies que la mienne » est un témoignage. Ce texte relate tant certains faits douloureux que les sentiments singuliers, inattendus, honteux parfois qui s'y rattachent. Témoin impuissant de situations qui le dépassent, l'auteur y met en lumière les mouvements de flux et de reflux de nos cœurs éprouvés par l'inimagineable. Il joue des paradoxes et des ridicules causés par la rencontre de nos élans spirituels avec ces petits riens qui forment l'essentiel de nos journées, et parfois de nos tragédies. Les tableaux sont précis, pesants mais bien vivants.

La soirée semble un peu sombre me direz-vous…Pourtant dans une deuxième partie du récit, Emmanuel Carrère parvient avec une désarmante adresse à nous faire sourire. Relatant la rencontre de deux juges, malades et boîteux, passionnés par les obscurs combats liés au surendettement. Des côtes de l'Océan Indien aux tribunaux d'instances de l'Isère l'auteur nous promène avec une égale et élégante humanité.

L'adaptation de Tatiana Werner et David Nathanson est dans la droite ligne du roman, sans artifices, se refusant à souligner inutilement un texte dont la sobriété fait la force. Plus qu'à une pièce de théâtre, c'est un récit auquel ils nous invitent, une histoire….une histoire d'adulte. Bien sûr elle est un peu triste, amère, mais la douceur n'en n'est pas exempte et l'amour en est l'essence même.

David WESTPHAL

« D'autres vies que la mienne », d'Emmanuel Carrère. Avec David Nathanson. Mise en scène, Tatiana Werner. Lumières et vidéo, Mathieu Courtaillier.

Au Théâtre La Reine Blanche, 2 bis, passage Ruelle 75018 Paris. Du 4 janvier au 11 février 2017, du mardi au samedi à 20h45 – relâches les 14, 25 et 26 janvier. Réservations : 01 40 05 06 96/reservation@reineblanche.com, www.reineblanche.com

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