Théâtre : « Le dernier ogre », de Marien Tillet en tournée et dans le off d’Avignon.

Inversion, par Clara.
Ce spectacle dérangeant nous met à la place de l'ogre et nous propose sa vision des choses. À partir du conte enfantin mais terrifiant, le comédien nous pousse loin des tabous de notre société propre et policée.
Deux histoires s'enchevêtrent pour se rejoindre, à travers lesquels la figure emblématique de l'ogre affreux, sale et méchant devient victime. Victime des temps modernes, de son envie de fuir un quotidien absurde, une vie pleine de compromis et de malheurs malgré un confort chaleureux et rassurant. Le malaise croit au fur et à mesure de l'avancée des récits, rythmé par une musique lourde, violente, pesante.
L'auteur cherche à interroger sur les modes de vie que nous imposent la société et la fragilité de ce vernis social. En effet, face aux difficultés et loin du regard des autres, il est facile d'oublier ce qui fait l'humanité en nous. Au-delà d'une simple critique des modes actuelles, l'auteur interroge sur la responsabilité de nos actes. Sommes-nous la somme de ce que nous mangeons et faisons quotidiennement, sans réfléchir ?
Sur scène, le comédien est accompagné d'un guitariste. Sa mélodie, comme un chant soutient le monologue intérieur ultra-violent. Le musicien utilise des boucles musicales pour enrichir l'univers sonore, renforçant le côté effrayant. La prestation du comédien est remarquable, tant il arrive à rendre tangible le malaise sans cesse grandissant. Une grande toile tendue derrière les personnages, s'anime de peintures blanches. Cette toile a sa vie propre ; elle illustre le conte en ajoutant au mystérieux et à l'horreur. Un texte écrit en alexandrins, une musique très rock'n'roll et rythmée, un visuel qui se nuance en blanc et noir, Marien Tillet inverse le sens du conte : l'ogre devient la victime.
Le questionnement peut sembler intellectuel et vain, cependant la prestation du comédien est inattendue et remarquable, bien qu'elle laisse une impression malsaine et incommodante.
Clara

« Le dernier ogre », création par Marien Tillet (poésie, musique, danse et art plastique). Compagnie Le Cri de l’Armoire, en association avec le Théâtre des Sources (Fontenay aux Roses). Le 21 mars au théâtre le Liburnia de Libourne, le 29 au théâtre André Malraux de Chevilly-Larue, le 3 avril au festival Mythos de Rennes, le 27 juin à Culture Commune, scène nationale du bassin minier du Pas(de-Calais et du 5 au 26 juillet dans le festival off d'Avignon. http://www.lecridelarmoire.fr/

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