Charité : bénévoles contre la solitude.

Tradition et  modernité.
À la Société saint Vincent de Paul(1), il y a deux traditions : joindre une foi réfléchie aux œuvres et être discret. La première est toujours d'actualité, et même revendiquées sur les messages radiophoniques qui sont délivrés depuis un certain temps. La seconde est en passe d'infléchissement. C'est qu'on a compris que si à la discrétion vis-à-vis des personnes aidées on joignait un défaut d'information sur les besoins de celles-ci, il n'y aurait bientôt plus assez de volontaires ni de fonds pour répondre aux nécessités croissantes engendrées par un monde de plus en plus dur, de moins en moins fraternel.
Mais il n'y a pas que ces messages appelant aux legs sur les ondes du service public. La société a également fait tourner un film. Sur les « robots de compagnie », façon originale de montrer qu'on aura toujours besoin de bénévoles, quelles que soient les avancées techniques. 
Son titre ? « B. E. N. – Bionically engineered nursing »(2). Il présente une personne seule vivant avec un robot qui assure les tâches ménagères. Si tout paraît de prime abord aller pour le mieux – et même une complicité se dessiner entre la femme et la machine – les limites sociales de l'engin font vite voler en éclats tout espoir pour l'humaine de briser sa solitude. Le réalisateur – David Wilson, élu réalisateur de l'année 2015 aux UK Music Video Awards – qui est connu pour ses clips musicaux, notamment avec Arctic Monkeys, David Guetta ou Lady Gaga, signe ici un court métrage de cinq minutes sobre et plein de sensibilité, au rythme de la vie d'une personne âgée. Qui se termine lapidairement par l'affichage d'un slogan : « Aujourd'hui, des robots de compagnie sont commercialisés pour accompagner les personnes seules. À la société de saint Vincent de Paul, nous pensons que seul l'être humain peut aider à lutter contre la solitude. Nous recrutons des bénévoles. »
Pour vérifier ce qu'on savait déjà par intuition au sein de l'association, cette dernière a réalisé une étude en France et au Japon (la société saint Vincent de Paul est internationale : présente dans 150 pays, elle compte 800 000 bénévoles et 50 000 équipes de par le monde) à partir d'un échantillon de 650 personnes ignorant la préparation du film. 
Il ressort de cette dernière que 91,28 % des Français privilégient le téléphone comme premier moyen de contacter autrui – et d'entendre sa voix – tandis que 96 % des Japonais se tournent vers les textos. Car la technologie est au cœur de nos vies : 63,93 % des Français et 50 % des Japonais ne sont déconnectés que quelques heures par jour. Et une grosse proportion de la population étudiée est consciente de l'impact de ce nouveau mode de vie sur nos habitudes : 59,84 % des Français et 52 % des Japonais sont d'accord pour dire que la technologie modifie les liens entre les gens. Cette dernière n'est d'ailleurs pas vue négativement : 88 % des Japonais et 59,9 % des Français pensent « qu'un robot peut aider une personne à prendre en charge ses tâches quotidiennes ». Par contre, une bascule se produit quand on considère la question sous l'angle de la solitude : 62 % des personnes interrogées ne pensent pas qu'un robot puisse aider à lutter contre la solitude ; par ailleurs 69 % des Français et 54 % des Japonais ne sont pas prêts à offrir un robot à une personne proche isolée.
Pierre FRANÇOIS
(1) www.ssvp.fr, tél. 01 42 92 08 10.
(2) visible à l'adresse www.ssvp.fr/editobenlefilm

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