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Portrait : Michel Voletti

vendredi 16 février 2007, par Pierre François


Michel Voletti fait partie de ces saltimbanques internationaux qui ont su trouver leur harmonie en eux même plutôt que dans l’attachement à des racines géographiques ou familiales.

De sa mise au monde par le Dr Schweitzer à Lambaréné, Michel Voletti n’a pas de souvenir. De sa jeunesse en Afrique puis en Asie non plus d’ailleurs. Il se rappelle par contre avoir entendu sa mère interdire à son parrain de lui proposer un rôle dans Les 400 coups de F. Truffaut. Si elle avait su ce qu’elle déclenchait en s’exprimant de la sorte…

Il débute à 19 ans dans un film d’Andy Warhol, à New-York. Puis s’installe à Paris, où il suit en parallèle deux cours de théâtre. Repart aux Etats-Unis travailler avec Lee Strasberg et Stella Adler. Intègre l’Actor’s Studio et la Shakespeare Compagnie. Joue dans des séries comme Magnum, Dallas, Mac Gyver, Agence tout risque, Arabesque, Clair de lune… Douze ans plus tard, il revient en France, joue au théâtre, au cinéma, à la télévision, effectue des doublages, produit un album pour Lina Koutrakos, fait de l’Aktéon théâtre une salle reconnue pour sa programmation…

Dans Mafiosa

Plus récemment, il a joué dans Plus belle la vie (FR3), Mafiosa (Canal +) et La compagnie des glaces (FR2).

Face à une vie aussi remplie, on se demande quelles sont les constantes d’un personnage aussi virevoltant. Cette question fut l’amorce d’un long entretien.

M. Voletti : Quelques caractéristiques ne m’ont jamais quittées. Tout d’abord un attachement très grand à ma liberté de penser, de parler, de pouvoir dire non. C’est dû au fait que je suis resté adolescent. Un ami me disait un jour que j’avais oublié de grandir après vingt ans. De fait, je suis resté romantique et fleur bleue en amour. Et même si je ne suis plus naïf, je continue à croire à la bonté humaine et à la possibilité de rendre les gens meilleurs.
Je crois aussi à la générosité, celle de l’âme et de l’être.
Malgré la dureté de mon éducation, j’ai toujours cherché la lumière, le soleil, la beauté. Je sais que le reste existe, mais je n’en veux pas dans ma vie. Ce qui ne m’empêche pas de jouer des rôles sombres ou pervers. Ce sont toujours des personnages très riches, et en tout être il y a une parcelle à aimer.
Enfin, j’ai toujours besoin de donner et de recevoir de l’amour. Je me sens éternellement en manque, de ce point de vue.

Question : Comment avez vous pu avoir une vision si idéale du monde et néanmoins y réussir une carrière ?

M. Voletti : Elle aurait pu être plus brillante, parce que, justement j’ai agi en conservant ma liberté, ce qui m’a parfois coûté cher. Il m’est arrivé, en début de carrière, de refuser un rôle proposé par un metteur en scène réputé parce que je n’adhérais pas à sa méthode de travail. Voire de lui préférer une comédie musicale – genre que j’adore – ou un personnage que je trouvais intéressant. J’ai toujours donné priorité au sujet et à la façon de jouer qui me procurait le plus de plaisir.

Question : De plaisir ? Dans conte d'hiver

M. Voletti : Oui, c’est à dire la façon d’agir qui me donnait le plus de bien-être mental. Et c’est vrai que dans la vie comme dans le travail, cela reste mon critère ultime. Car si j’éprouve du plaisir je sais que je serai capable de réaliser un travail bien meilleur. Ainsi ai-je décidé de jouer dans Conte d’hiver de Rohmer alors qu’on me proposait en même temps un rôle dans une série B, bien plus lucratif. Quand je suis parti aux Etats-Unis pour me perfectionner, on m’a rapidement proposé des rôles dans des feuilletons mélodramatiques mais j’étais venu pour apprendre à être un meilleur comédien et pas pour cela. J’ai refusé et suivi l’Actor’s Studio. Mais j’ai payé cette liberté, même si elle m’a permis de rester en accord avec moi-même.

Question : Cela ne vous a pas mis sur la touche pour autant.

M. Voletti : Non, et j’ai beaucoup de chance. Outre les récents tournages que vous avez cités au début, je double un des rôles principaux dans Secret show, un dessin animé qui sera diffusé par FR3, prête ma voix au colonel Tigh dans la série Battlestar Galactica et suis en train de préparer une pièce, L’anniversaire de Jules Vallauri.

Question : Parlez nous un peu de cette pièce.

M. Voletti : c’est la confrontation entre un père et son fils quatorze ans après le départ du père, une absence de communication entre les parents et la prise en otage du fils par la mère. Si le ressort comique tient dans le fait que le père a quitté sa mère pour un homme, les thèmes essentiels sont ceux de la séparation du couple et du besoin de l’enfant de retrouver l’absent.

Question : Michel Voletti, quels sont les meilleurs souvenirs de votre carrière ?

M. Voletti : J’en ai beaucoup. La première fois que j’ai eu un premier rôle au cinéma dans Justocoeur qui est allé au Festival de Cannes. Bien entendu le film d’Eric Rohmer, Conte d’hiver, avec lequel nous avons gagné le Prix de la Critique Internationale au Festival de Berlin. Ou encore l’oratorio Jeanne d’Arc au bûcher et le De profundis d’Oscar Wilde. Jeanne d’Arc au bûcher est une œuvre sublime, mystique. Et jouer sur les plus grandes scènes internationales aux côtés de Marthe Keller sous la baguette de Kurt Mazur, qui est aussi fascinant que paralysant, est une expérience dont on se souvient… Quant au De profundis que j’ai traduit, adapté et joué, ce que j’ai ressenti avec ce rôle et les réactions de certains spectateurs m’a apporté une telle joie que j’ai encore du mal à en parler de façon concise. Ces deux expériences furent pour moi si puissantes que j’en ai des frissons à chaque fois que je les évoque.

Question : Ces œuvres ressortent d’un répertoire spirituel. Pourriez vous, pour les internautes de holybuzz.com, vous confier sur ce point ?

M. Voletti : Je crois qu’il n’y a qu’un seul Dieu, une seule Lumière, quel que soit le nom qu’on lui donne, et que je prie régulièrement sans pouvoir le nommer.
Au départ j’ai été élevé dans la foi catholique, mais le jour de ma communion le curé a refusé que mes parents divorcés assistent à la cérémonie. Cela m’a marqué, et brouillé avec l’Eglise. C’est par le bouddhisme et son type de méditation que peu à peu j’ai renoué avec la prière dans les églises vides, puis retrouvé le plaisir d’assister à la messe. Je pense que « croire » nous aide à mieux vivre.

Pierre FRANCOIS


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