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Musée de la Marine : Jouets ou bijoux ?

vendredi 31 août 2007, par Pierre François


Du mouvement d’horlogerie enchâssé dans un écrin d’ébénisterie au fer blanc peint, embouti et serti, c’est toute l’histoire de la naissance d’une industrie qui se déroule. Avec ici pour thème le bateau.

Comme toutes les expositions qui ont lieu au Musée de la Marine de Paris, celle sur les bateaux-jouets [1] est particulièrement soignée. Elle couvre l’âge d’or du jouet, l’époque où ce qui fut d’abord maquettes luxueuses et fidèles jusque dans des systèmes de propulsion fonctionnels destinées à un public connaisseur devint petit à petit une industrie. Il faut prévoir une heure et demie sans traîner, deux si on veut prendre le temps de savourer le plaisir de contempler de véritables merveilles.

À tout seigneur tout honneur, l’exposition s’ouvre sur des arches de Noé remontant jusqu’à 1850. Toujours datant du milieu du XIXe siècle, on trouve ensuite un bateau à rames avec sa passagère et son compagnon aux avirons, mûs par un mouvement d’horlogerie.

Ce qu’on nomme ainsi est évidemment plus encombrant que les mécanismes des montres, mais le principe reste celui du ressort dont la tension est régulée par un mouvement qui assure une vitesse sans à-coups. Ce qui n’est pas le cas de l’élastique ni du système à réaction qui expulse de l’eau dès qu’un solide a dégagé une pression suffisante au contact du liquide. Mais les deux systèmes propulsifs les plus utilisés seront la vapeur et, plus tard, l’électricité.

Un bateau comme le « Comte de Hainaut », avec sa chaudière opérationnelle, est à cet égard plus qu’un jouet : la précision et le soin qui y sont apportés situent cet objet entre la maquette et le bijou.

On remarque au passage que les fabricants respiraient l’air de leur époque et l’exhalaient pareillement. Ainsi, en 1917, peut-on lire sur la publicité pour un sous-marin : « jouet scientifique et bien français, car il ne torpille ni les femmes ni les enfants ». Inutile de préciser que dans la période qui suit les bateaux présentés sont très majoritairement de guerre.

Mais le jouet a aussi une autre fonction : diffuser les nouvelles technologies. Ainsi la torpille est mise au point en 1864 et existe en jouet vers 1900. En 1920 est inventée la propulsion selon l’effet Magnus et le bateau qui fera la traversée de l’Atlantique en 1926 navigue déjà en 1924 : le jouet sort en 1925. L’italien Agello bat le record du monde de vitesse sur hydravion avec son F 260 en 1934 et le jouet sort deux mois après.

Parfois, cette rapidité à produire des répliques en miniatures n’est pas exempte d’arrière-pensées, propagandiste diraient les uns, patriotiques diraient les autres, en tous cas sûrement commerciales. Ainsi la reproduction en jouet du yacht de Guillaume II est-elle baptisée pour le marché français « France ».

Cette industrie naissante multiplie son chiffre d’affaire par sept entre 1849 et 1900. Et, pour imaginer la qualité des produits, il suffit d’évoquer les marques Märklin ou Fleischmann, qui se sont recentrées par la suite uniquement sur les trains électriques. Mais elles n’étaient pas les seules : Bing, Carette, Schoenner, Arnold, Plank, Hess doivent aussi être compté au nombre des fabricants allemands tandis qu’en France on trouvait Radiguet, Rossignol, Lefebvre, Baré, Heller et Coudray, J. E. P., Hornby Meccano, J. R. D., Vébé, Gil.

Mais l’exposition ne présente pas que des maquettes allant du chef d’œuvre d’atelier à la tôle emboutie et hermétiquement sertie. Un bassin est reconstitué, avec ses voiliers. Des tableaux évoquant ces jeux sont exposés, de même que des photographies de Willy Ronis, dont plusieurs prises au jardin du Luxembourg. Par ailleurs, il convient de noter que l’exposition présente aussi, outre l’hydravion d’Agello, un scaphandrier, un cygne ou un dauphin nageur, un canot de sauvetage, et même une nacelle de manège en forme de bateau. Enfin, on peut se faire une certes incomplète mais première idée de cette exposition sur le site du musée de la Marine, qui comporte même un enregistrement vidéo sur la préparation d’icelle.

Pierre FRANCOIS

Notes

[1] « Bateaux jouets », jusqu’au 1er octobre. Au Musée national de la Marine, Palais de Chaillot ; M° : Trocadéro, bus 22, 30, 32, 63, 72, 82, batobus « Tour Eiffel ». Ouvert tous les jours sauf le mardi de 10 heures à 18 heures. Entrée à 9 €, Tarif réduit 7 €, de 6 à 18 ans 5 €, billet équipage : 29 €.


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