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Théâtre : Une diva à Sarcelles, et en plein délire...

jeudi 26 février 2009, par Pierre François


« Une diva à Sarcelles » [1] est le genre de pièce qu’on aimerait voir souvent : poésie, gravité et humour sont au rendez-vous dans ce qui prend la forme d’un divertissement aux rebondissements inattendus.

Avec tendresse, l’auteur (Virginie Lemoine) brosse la personnalité d’une artiste lyrique qui se retrouve au chômage et sur le point d’être expulsée après une carrière médiocre. Le seul à voir son public, lequel l’attend en permanence dans sa cuisine, est le gardien de l’immeuble, qui finira par lui faire une déclaration bien originale... Son pianiste est là, en permanence à sa disposition, qu’elle dirige grâce à la télécommande de sa chaîne. Les voisins, eux, n’apprécient guère ses vocalises... « Vieille folle », entend-on à travers la cloison, et elle de répondre sur le même ton « Ferme la, fourmi ouvrière ! » Pour tenir le coup, elle marie tranquillisant et alcool tout en essayant de trouver des élèves mais en refusant de candidater pour des travaux aussi dégradants que de nettoyer les escaliers. Bien entendu, elle refuse d’entendre qu’elle puisse être considérée comme dérangée, ce qui lui permettrait d’obtenir une aumône de l’État.

« Une diva à Sarcelles » est donc un spectacle musical, mais aussi réellement joué que la voix est talentueuse. Mise en scène et jeu des comédiens parviennent à ce résultat étonnant qu’on finit par se glisser dans la tête de cette diva de cuisine (« si ils me mettent en foyer, où vais-je mettre mon public ? »), indépendamment du décor désespérément banal de son environnement.

On ne voit pas le temps passer et si on commence par sourire, on ne tarde pas à rire à chaque paralogisme, fourvoiement ou aberration. Au point que quand elle parle à son public, c’est celui de la salle qui lui répond. Et pourquoi cesser de chanter l’air de Marguerite quand le téléphone sonne ou se priver de communiquer à son public le texte d’une assignation ? Ce qui paraît de prime abord absurde, et donc comique, finit par devenir évident. Mais alors d’autres circonstances surgissent, qui prennent le relai, tandis que les airs d’opéra s’enchainent, caricaturés dans leur forme mais parfaitement bien chantés.

Le texte est aussi évocateur que le décor est illustratif, qui note qu’ « il y a autant de différence entre ces deux techniques [de chant] qu’entre un castor et Simone de Beauvoir », ou parle des « choeurs de Monoprix ».

Ce à quoi l’on assiste, finalement, c’est à ce qui se passe « quand on est habité par une passion dévorante et qu’à l’intérieur on n’est pas à la hauteur »... C’est en cela que le sujet est également grave, mais sans jamais devenir pesant.

Enfin, les trois comédiens sont parfaits dans leur rôles : la cantatrice qui en fait juste ce qu’il faut de trop pour déclencher l’hilarité, le gardien qui évoque parfaitement et la discrétion et la tendresse, le pianiste enfin qui joue le rôle de l’artiste révolté d’être aussi instrumentalisé.

Pierre FRANCOIS

Notes

[1] « Une diva à Sarcelles », comédie musicale écrite et mise en scène par Virgine Lemoine. Avec Brigitte Faure, Michel Tavernier, Jozef Kapustka, Marie Chevalot (ou Samantha Rénier). Du dimanche au mardi à 19 heures à la Comédie Bastille, 5, rue Nicolas Appert, Paris-11e, M° Richard-Lenoir. Places à 24 €, 10 € pour les moins de 26 ans. Tél. : 01 48 07 52 07. www.comedie-bastille.com


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