Theâtre : Sophia Aram

« Crise de foi » [1]est une belle entreprise d’équilibrisme. Sophia Aram y fait rire à propos des trois religions monothéistes. Elle commence par apparaître dans un costume typé (burqa, chapeau de rabbin, voile de religieuse), qu’elle abandonne ensuite pour examiner chacune des religions, voire les comparer, à l’aune de sa logique propre.

On reste admiratif quant à la précision de sa documentation, qu’elle utilise ensuite pour construire un spectacle qui fait réfléchir autant que rire. En effet, partant de l’idée que « si tu passes toute ta vie à faire ce qui est dans le Livre pour gagner le paradis, tu vas vivre l’enfer, mais sur terre », elle écorne tout ce qui lui paraît absurde ou cocasse au regard d’une réalité bien peu idéale. Ainsi pour elle est-il « plus facile de prêcher le préservatif à des prêtres que le jeûne à des habitants du Burkina Faso ». De même relève-t-elle que certains rabbins interdisent le hamburger dans la mesure où, peut être, la viande provient-elle du veau qui a tété le lait qui a donné la tranche de fromage. Parfois, cette femme d’origine musulmane se plaît-elle à souligner les points communs entre les trois religions monothéistes. Ce peut être un récit biblique qui crée la lumière avant d’inventer le soleil la produisant ou la morale sexuelle.

« Est-ce qu’on peut rire avec Dieu sans prendre de risque ? », demande-t-elle. Et de répondre : « Oui, à condition qu’il trouve ça drôle... ». Alors, elle nous fait profiter d’un talent d’imitatrice extraordinaire qui donne un spectacle vivant, drôle et bourré de mimiques.

Si l’enfant est un don de Dieu, les jumeaux sont-ils une offre promotionnelle ? Quand une personne agonise longtemps avant de mourir, cela signifie-t-il qu’Il hésite à la rappeler auprès de Lui ? Il y a aussi une méditation sur l’invention du clitoris ou un sketch sur trois pratiquants dans une station spatiale très bien vus. Bref, à condition de savoir rire de soi-même, on passe un excellent moment.

Pierre FRANCOIS