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Théâtre : La petite Chronique d’Anna Magdalena Bach

dimanche 13 mars 2011, par Pierre François


« La petite chronique d’Anna Magdalena Bach » [1] est une très belle pièce, qui cultive l’amour conjugal jusqu’après la mort. C’est en effet que la femme de Jean-Sébastien est sans cesse restée amoureuse de lui. Au tout début du spectacle, on est surpris par le fait qu’elles sont cinq comédiennes à interpréter la même femme, mais on est très vite pris sous le charme de ces voix qui s’expriment tantôt en monologue, tantôt en dialogue, à l’unisson ou en canon. Cette mise en scène est à la fois originale, classique et vivante : le cocktail idéal qui crée la surprise sans dérouter.

Le jeu est tellement clair que l’identité de chacune des comédiennes est évidente tant elles sont toutes identiquement joyeuses et éprises. Et si d’aventure l’une entre temporairement dans la peau d’un autre personnage, on le réalise à la seconde même du changement de rôle.

Mais elles sont encore instrumentistes : violoncelle et piano alternent, avec quelques moments d’humour quand le violoncelle veut jouer à contretemps ou qu’elles sont quatre côte à côte à toutes jouer d’une seule main sur le clavier.

Toute tournée vers son mari, Magdalena nous raconte comment ils se rencontrèrent, ainsi que les traits de caractère de son époux, sa vie de couple, familiale, professionnelle tout au long de leurs trente années de mariage... On apprend ainsi qu’il disait que « le temps est un des dons les plus précieux de Dieu, un jour nous devrons en rendre compte devant le trône céleste », ou qu’il pleura tout en composant « la Passion selon Saint Matthieu », Elle fait découvrir les morceaux de musique qui furent familiers à la famille (la chanson de la pipe, ou celle qu’il lui dédia). Cela crée une atmosphère douce et sereine, délicate et pleine d’émerveillements, qui s’étend d’un bout à l’autre du spectacle.

Authentique aussi, alors pourtant que les propos tenus sont extraits d’un pseudo journal intime de celle qui fut une seconde épouse, rédigé en fait en 1925 par une musicologue spécialiste de Bach, Ester Meynell. Elle montre avec délicatesse les sentiments de celle qui hérita d’emblée de quatre enfants avant d’en perdre presque autant que ceux qui survécurent. On se rend compte au passage de la réelle peine que provoquait chacune de ces morts enfantines : l’importante mortalité infantile de l’époque n’amoindrissait pas pour autant le prix de la vie. Bref, on tient là un spectacle qui mérite largement que l’on aille jusqu’au Théâtre Douze qui, s’il est un peu difficile à trouver (au sous-sol du Centre International de Séjour de Paris de la porte de Vincennes), est par ailleurs d’un confort remarquable.

Pierre François

Notes

[1] « La petite chronique d’Anna Magdalena Bach », d’Ester Meynell, au théâtre Douze, 6, av. Maurice Ravel, 75012 Paris, M° Bel Air, Pte de Vincennes du jeudi au samedi à 20 h 30, dimanche à 15 h 30 jusqu’au 4 avril. Avec Louise Bouvet, Laetitia Brecy, Stéphanie Lanoy, Christine Sammer, Nathalie Soussana (au piano). Adaptation et mise en scène : Hélène Darche. Tél. : 01 44 75 60 31. www.theatredouze.org


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