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Théâtre : "Au bonheur des hommes"

jeudi 8 septembre 2011, par Pierre François


« Au bonheur des hommes » [1] ne fait pas dans la dentelle, mais dans le talent ! Talent de polémiste comme de littérateur, des musiciens comme des comédiens, qui sont toujours à la limite de la caricature sans jamais y tomber et s’amusent avec le public autant qu’ils le font rire...

« Au bonheur des hommes » n’a que peu à voir avec le monde masculin : il faut plutôt prendre le mot dans son acception d’humanité. Ce « cabaret satirique et musical », ainsi que l’annonce le sous-titre, fait en effet le bonheur des spectateurs, tous sexes confondus.

Dans un style de comédie, des vérités sont assénées : le dicton castigat ridendo mores (il [le théâtre] corrige les moeurs en riant) est encore d’actualité ! Sur scène, on trouve deux ensembles de trois comédiens. D’une part les musiciennes du groupe « Djazz’elles », qui jouent plus la mélodie que la comédie, en habits bariolés de couleurs chaudes. D’’autre part, les rôles classiques, sérieux, qui jouent plus le texte qu’ils ne chantent, en tenues noires. Autant dire qu’aucun n’est l’accessoire de l’autre et que c’est ensemble qu’ils créent une atmosphère qui porte à rire des drames du moment, grâce à la satire.

Ce qui frappe le plus est que ce cabaret soit aussi politique (la pièce commence par une scène dans laquelle des bohémiennes mendiantes se font contrôler sans papier par la police) que talentueux. Ce qui est rare tant les textes engagés transforment généralement les personnages en simple illustrations d’une thèse. Ici, pas une seconde, ce sont au contraire les personnages qui semblent avoir la maîtrise de leur propos, comme la nature le veut.

Si on est encore dans la satire de caractères humains propres à toute une société (chanson sur la manie de s’empiffrer) propre au théâtre classique, on est aussi dans le cabaret qui s’empare de l’actualité pour railler les pouvoirs (« t’as du boulot Nico »). Ce dernier point étant rééquilibré par un réel talent quant à la précision et à la richesse du vocabulaire. A cet égard, même si le thème du refus d’appeler les choses par leur nom (le balayeur qui est technicien de surface, l’aveugle qui devient mal-voyant, etc) est rebattu, il est ici traité avec une particulière drôlerie.

Mais que l’on juge de tout cela par quelques extraits !
« On ne fait plus la charité
Comme autrefois les bons chrétiens
Place à la solidarité
Qui nous permet de donner moins
Et bien que la langue de bois
Soit bien plus longue et moins pratique
On n’appelle plus un chat chat
Mais un félidé domestique ».
Dans la même veine, on trouve encore :
« On peut tout dire, mais faut la forme

On peut tout dire, excepté, sauf
Ce qui peut provoquer des heurts
Mais on n’peut pas dire que les beaufs
Ce sont les maris de ma sœur ».

Plus polémique déjà, on a :
« Ah quelle angoisse les régimes
Pour éviter l’obésité
Ça nous fait mal, ça nous déprime
Et ça nous mine la santé

Vraiment le pauvre a de la chance
Car il n’a pas à se forcer
Oui c’est facile l’abstinence
Le pauvre n’a rien à manger
Lui ».

Mais il faudrait citer toutes les chansons de ce cabaret in extenso ! Et il est un critère qui ne trompe pas quant au succès du spectacle : en plein mois d’août, la salle était bondée et a rappelé les comédiens quatre fois...

Pierre FRANCOIS

Notes

[1] « Au bonheur des hommes, cabaret satirique et musical », de Jean-Marie Lecocq. Avec Véronique Ataly, Christian Gaitch, Jean-Marie Lecocq et le groupe « Djazz’elles » composé de Clarisse Catarino, Eva Slongo, Anne Gouraud-Shrestha. Mise en scénographie : Philippe Quillet. Du mardi au samedi à 21 h 30 jusqu’au 9 octobre au Lucernaire, 53, rue Notre-Dame des champs, 75006 Paris, tél. : 01 45 44 57 34.


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