Festival off d’Avignon : "Antigone Vietnam"

>« Antigone Vietnam » [1] est une pièce étrange. C’est d’abord la continuation d’une belle aventure qui dure depuis cinq ans entre une troupe française et une vietnamienne. C’est encore un spectacle qui arrive au festival d’Avignon auréolé de son succès au dernier festival de Hué. C’est enfin un bilinguisme totalement réussi, de sorte qu’à aucun moment on n’est gêné d’entendre les dialogues s’effectuer dans les deux langues.

Pour autant, comment qualifier cette oeuvre autrement que comme un concert joué qui n’est pourtant pas un opéra (les interprètes chantent rarement) ? Et comment passer sous silence l’extrême violence des percussions, qui aboutit – ce qui est tout à fait logique avec le contexte - à un sentiment d’oppression qui rend le spectacle gênant ?

De façon complémentaire par rapport au bilinguisme, les jeux des comédiens appartiennent à des registres très différents : vietnamien traditionnel et épique pour l’oncle traître, occidental démonstratif pour Ti-An, à mi-chemin entre les deux pour les frères... On remarque aussi l’utilisation des masques de Commedia dell’arte, mais replacés dans un contexte tragique asiatique. Cette pièce est exceptionnelle du point de vue des influences réciproques et de la réception du langage d’une culture par un public d’une autre. Reste qu’elle est d’une rare (et longue) violence.

Pierre FRANCOIS