Théâtre : La Campagne

« La Campagne » [1] est une bonne surprise ! Programmée au Lucernaire jusqu’au 26 octobre dans la salle confidentielle du « Paradis », cette pièce se montre d’emblée hors norme : des personnages justes auxquels on croit immédiatement, mais surtout une ambiance de mystère qui tient le spectateur en haleine jusqu’au bout.

Tel un bon polar, le texte de ce spectacle ne livre la clef d’un mystère que pour en faire apparaître un nouveau. Parfois avec évidence – le mari se coupe devant sa femme soupçonneuse – mais à d’autre moments il ne reste plus qu’une atmosphère si épaisse qu’on ne sait même plus où se situe la dissimulation, jusqu’à sa révélation subite. On va ainsi de rebondissements en rebondissements, ne comprenant qu’une chose : l’époux s’est mais dans une sale situation et a commencé à mentir, chaque mensonge en appelant un nouveau... Pendant longtemps on se demande si la cause en est une faute ou un désir de protection.

Il n’y a que très peu d’éclats de voix lors de ces explications entre le mari et son épouse, qui lui tire les vers du nez un à un, avec autant de difficulté que d’élégance et d’indignation retenue. Avec la jeune femme qu’il dit avoir trouvé inconsciente au bord de la route pour expliquer qu’il la ramène sous le toit familial, on se demande si cette femme de médecin de campagne ne va pas tisser une complicité féminine. La relation entre la jeune droguée et le praticien est bien différente... On passe de vraies en fausses pistes à plaisir tandis que tous les personnages sont interprétés avec une grande vérité. Le cycle se clôt enfin, d’une manière tout aussi inattendue que les précédents épisodes, mais quels lendemains cette dernière étape annonce-t-elle ?

Pierre FRANÇOIS