Amour fou.
« La Promesse de l’aube » qui se donne en ce moment au Lucernaire débute à l’adolescence du narrateur, lorsque sa mère et lui s’installent à Nice. Très vite, le comédien donne le ton : celui d’une gêne face aux extravagances de sa mère qui n’a d’égale que l’amour inconditionnel qu’elle lui porte et les efforts démesurés du fils pour se révéler à la hauteur des attentes de cette dernière. Il est narrateur, mais aussi interprète de tous les personnages et passe de l’un à l’autre de façon entièrement crédible et claire d’une fraction de seconde à l’autre. Le mariage entre le décor, sobre évoquant sa Russie natale, et les lumières, traduit parfaitement l’atmosphère chaleureuse de la relation entre les deux. On rit – surtout les femmes, et pour cause… – avec lui, qui ne se prive d’aucune occasion d’autodérision. D’un rire – et c’est là que se révèle le talent du comédien qui sait ainsi faire participer le public à l’action – qui est mêlé d’une grande tendresse pour ces personnages vivant dans des conditions miséreuses, mais aux ambitions hors du commun.
La communion entre le public et la scène va jusqu’à un point qui serait une marque de manque de talent dans tout autre spectacle : lorsque le comédien réprime lui-même un rire ou adresse un aparté aux spectateurs, par exemple : « le rêve de la démocratie est d’élever le prolétaire au niveau de la bêtise du bourgeois, ce n’est pas dans le texte, mais cela m’amuse de le dire ».
Ce spectacle est un de ces moments rares qui élèvent l’âme du public en le faisant passer régulièrement du sourire tendre au rire franc.
Pierre FRANÇOIS
« La Promesse de l’aube », de Romain Gary, adaptée par et avec Franck Desmedt. Mise en scène : Stéphane Laporte et Dominique Scheer. Du mardi au samedi à 18 h 30, dimlanche à 17 heures jusqu’au 7 novembre au Lucernaire, 53, rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris, tél. 01 45 44 57 34, http://www.lucernaire.fr/theatre/4248-la-promesse-de-l-aube.html
Photo : Pierre François.